Ce livre que je n'ai jamais terminé d'écrire

J'ai écrit le livre de mes années de voyage en solo autour du monde quatre fois. Et je ne l'ai jais jamais terminé.

Et si, je suis véritablement honnête avec moi-même, il y a toutes ces autres fois, où je l'ai imaginé et écrit intérieurement. Je pourrais me dire que cela ne compte pas. Mais bien sûr que cela compte. Toutes ces heures, à rêver, à imaginer, à planifier, à structurer, toutes ces phrases et ces idées qui se sont présentées à moi, que je n'ai jamais écrites ou ancrer dans la réalité, toutes ces possibilités de livres qui ont flotté en moi, autour de moi.

Quatre fois, ce sont des heures et des heures de travail et de brouillon, des mois et des années à écrire, reformuler, réinventer. J'ai commencé à écrire ce livre sur le voyage en solo en 2017, quelque part entre le Japon et la Thaïlande. L'idée sonnait déjà en moi quelques années auparavant, mais je n'avais pas eu le courage de m'y mettre, me sentant complètement illégitime.

En 2017 et 2018, j'ai écrit ce livre, je m'y suis "mise sérieusement", souvent tiraillée entre mes voyages, l'écriture sur mon blog de voyage, ma vie personnelle et mon burnout, qui déclencherait dans son sillage problèmes de santé, dépression, m'emmenant jusqu'au plus bas où je n'avais jamais été. Ce n'était pas vraiment le moment pour écrire un livre, en tout cas, pas de la manière que je le faisais. Car je n'écrivais pas entièrement et authentiquement, mais j'essayais plutôt de rentrer dans les cases, en répondant aux besoins et questions de mes lectrices et du marché, bien plus qu'à l'idée ou l'appel de ma créativité.

Ecrire un livre sur le voyage en solo à Chiang Mai en Thaïlande - Ce livre que je n'ai jamais terminé d'écrire
Ecriture du premier brouillon dans mon appartement à Chiang Mai

Ce livre que je n'ai jamais terminé d'écrire, je l'ai écrit au Japon, je l'ai écrit en Thaïlande, je l'ai écrit en Angleterre, je l'ai écrit en Suisse, je l'ai écrit en Allemagne, je l'ai écrit à Paris, je l'ai écrit en Bosnie, je l'ai écrit à Edimbourg. Et non, je ne voyageais pas rapidement alors. J'ai travaillé sur ce livre en vivant dans chacun de ces lieux, en remède au vide, en exutoire à mes pensées et émotions, évitant de faire face à ce qui passait vraiment dans mon intériorité.

En 2019, j'ai fait une proposition d'ouvrage à plusieurs maisons d'édition. Cela n'a rien donné. Je me suis à nouveau retrouvée à écrire ce livre, sans trop savoir comment, sous un nouvel angle, dans une nouvelle langue, dans une énergie de colère et de purge. Cette version, je l'écrivais comme une thérapie, en parallèle d'une thérapie que je suivais. Il ne verrait jamais le jour.

Ce livre que je n'ai jamais terminé d'écrire - Un hiver en Suisse à travailler sur le livre
Un hiver en Suisse et en housesitting, à écrire le livre

Et puis, j'ai lâché prise, je me suis laissée emportée ailleurs, par le flow de mon intuition, de ma vie et de ma réinvention professionnelle. Mais à l'hiver 2020, comme une relation que l'on n'arrive pas à arrêter, à laquelle on revient encore et encore régulièrement, je me suis remise à écrire ce livre. De manière plus posée, plus réfléchie, plus centrée, avec tout de même une volonté de parler à ces voyageuses, que j'allais bientôt "abandonner" avec ma retraite du blog. En sabbatique, essayant déjà de quitter cette vie qui ne me convenait plus, dans une mue douloureuse dans mon subconscient, il y avait sans doute de la culpabilité qui s'infiltrait. J'ai alors été prise en Master d'écriture de scénarios, j'ai déménagé en Ecosse, j'ai pris ma retraite du blog et j'ai oublié le livre...

La plage de Portobello, Edimbourg, sous la neige - Un hiver de vide, de réflexions et d'écriture

...jusqu'à l'hiver suivant, dans ma pause hivernale, lors de mes vacances du Master. J'ai à nouveau écrit, j'ai recommencé ce livre, portée par cet élan qui revenait à moi chaque année, comme une mauvaise habitude, comme une addiction, comme un cocon confortable pour remplir le vide, l'absence de projets et les doutes sur mon futur. J'ai tenu le cap, bien plus longtemps que d'habitude, j'ai écrit de longues pages et chapitres, j'avais l'impression que cette fois-ci, c'était le bon... Et puis, bien sûr, l'été est arrivé, et avec lui mon projet de fin d'année du Master et un film à écrire. Je n'ai plus travaillé sur le livre, je n'ai plus rouvert ce chapitre ou ce document Scrivener.

Il est revenu frapper à la porte encore cet hiver, mais je n'ai pas succombé à la tentation. J'ai presque failli y tomber bien sûr, car la douceur de l'hiver, des vacances et de mes détox digitale est toujours propice pour se lancer dans un nouveau projet.

Et c'est en écrivant ces quelques lignes, que je me rends compte qu'il est temps de lâcher prise sur ce projet pour de bon. Une partie de moi a envie de dire, d'écrire, que ce n'est que pour le moment, que ce sera un projet pour le futur, mais je sais aussi que c'est pour me rassurer. Finalement, le lâcher prise, c'est laisser aller une situation, une personne, un projet, en ayant conscience et confiance que cette chose se passera ou non dans le futur, et être en paix, en présence avec ces deux situations, sans les juger, sans s'y attacher, sans plus y penser. Et je crois bien que j'en suis enfin là. Il ne me reste plus qu'à archiver les manuscrits.

De ce livre écrit quatre fois, jamais terminé, jamais publié, de ce projet jamais concrétisé, j'ai énormément appris. Sur mon écriture, sur mon style, sur ma voix/e, sur ma résilience, sur mes capacités d'adaptation en tant qu'auteure, sur le stream of consciousness, sur les possibilités thérapeutique de l'écriture et sur moi-même. Il y a tant de révélations et réalisations, tirées de cet ouvrage multiforme, dont je ne me souviens pas. Mais ce n'est pas important. Il est important surtout que je me souvienne de l'énergie qu'il a laissé en moi et de cette transformation qui a eu lieu, au fond de moi et dans ma voix d'auteure. Ces quatre brouillons sont le reflet de quatre phases de ma vie, quatre expressions de moi, quatre moments figés dans le temps. Sauf qu'aujourd'hui, cet ouvrage, ces expressions n'ont plus leur place dans ma vie actuelle.

J'ai également appris que j'avais du mal à fermer les cycles, à terminer des projets et à lâcher prise. J'ai appris, petit à petit, à faire confiance en mes idées et ma propre voix d'auteure, pour ne plus être le miroir ou l'image de ce que la société attend de moi, et à ne plus répondre aux projections de mon entourage dans mon écriture. J'ai appris à être vraiment moi dans mon écriture, avant de/ ou pour pouvoir me montrer au monde. J'ai appris à ne plus voir la finalisation ou la publication d'un projet comme le Saint-Graal, mais plutôt comme un processus révélateur et transformateur. Et en lâchant prise enfin sur ce livre, je sais que je deviens plus pleinement, plus visiblement, l'auteure et la personne que je veux être, que je suis.

Je peux maintenant me diriger avec sérénité et joie vers la fiction et vers d'autres projets. Et ça, je n'aurais jamais pu le faire sans cette exploration de 5 ans, sans ces quatre brouillons, sans ces essais et ces échecs, sans mes mois de procrastination et sans mes élans enjoués et créatifs annuels. Tout ces doutes, toutes ces peurs, toutes ces heures passées à écrire, à réfléchir, à imaginer n'ont pas été perdues. Au contraire, elles ont formé l'auteure, l'artiste et la scénariste que je suis aujourd'hui.

J'ai écrit un livre quatre fois. Je ne l'ai jamais terminé. Mais ma vie créative elle, ne fait que commencer.

PS ou Plot twist... Quelques jours plus tard, je décidais d'écrire et de lancer l'Envol, une série audio intuitive, qui raconte mes éveils spirituel, créatif et écologique, suite à mon burnout et ces années de voyage, qui s'écrira chaque semaine dans les oreilles des auditeurs.rices. Le lâcher prise mène parfois plus vite qu'on ne le pense à la suite du chemin. :)

Lâcher prise et faire confiance à son intuition, en créativité et en écriture - Lucie sous un arc-en-ciel sur une plage en Ecosse

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